Depuis un moment déjà il nous semblait nécessaire d’écrire cet article d’intention faute de pouvoir faire le travail d’analyse et de rectifications ou de commentaire des archives qui serait nécessaire. Ce jour de navrante fête nationale dans le contexte déplorable qu’on connait nous semble parfaitement approprié pour le faire.

Un mea culpa d’abord : en dépit d’une volonté de rendre justice à l’histoire d’un instrument et à la culture qui lui a donné le jour, ukulele.fr a commis, à divers degrés, toutes les fautes possibles en termes d’appropriation culturelle, d’exploitation de l’exotisme avec la vision masculiniste qui l’accompagne, et surtout de reconnaissance historique et actuel des luttes du peuple hawaïen et des cultures océaniennes dont nous avons parlées.

Le nom original de ce site était King David Ukulele Station, maladroit hommage au « merry monarch » David Kalakaua, que nous connaissions essentiellement à travers la caricaturale lentille coloniale, projetant sur lui l’image d’un musicophile débonnaire et hédoniste, cédant au cliché européen sur les insulaires d’Océanie. David Kalakaua méritait mieux, et malgré les nombreuses références qu’apporta en ces pages le regretté Cyril LeFebvre, il nous semble important que nous précisons ici que nous savons et souhaitons que David Kalakaua soit d’abord remémoré comme un monarque digne, non belliqueux, qui a souhaité activement moderniser son pays et connaître le monde, non comme un pays dilettante privilégié, mais bien pour diplomatiquement tenter d’éviter la colonisation et l’éradication des cultures hawaïennes. Victime d’un coup d’état fomenté directement par des intérêts états-uniens capitalistes et coloniaux, ce projet sera hélas un échec. Ainsi, si nous n’avons jamais manqué de rappeler que l’instrument qui nous a ici rassemble devait tout ou presque à Kalakaua, rappelons nous que son effort était lié à la volonté de préserver la culture hawaïenne et son essence, et espérons ne jamais oublier de rappeler ces luttes quand nous présentons l’ukulele.

Lidya Liliuokalani, son héritière, que nous connaissons pour avoir écrit les paroles de l’hymne Aloha Oe, a été elle aussi une victime du colonialisme, enfermée en prison arbitrairement et déchue de son trône par des forces étrangères, coupable d’être une femme leader, toujours fidèle à la cause hawaïenne, mérite elle aussi notre respect et notre admiration.

Ce rappel historique nous semblait nécessaire pour inviter à la vigilance devant toute exploitation qui réduirait la culture et le peuple hawaïen à des caricatures dont nous ferons une courte liste non exhaustive :

  • colliers de fleurs en plastique ou non appropriés par des non hawaïens ou non polynésiens, vidés de leur sens, réduits à des ornements et dépouillés de leur spiritualité.
  • imitation des danses et rites du Hula,
  • répertoire musical qui objectifie les femmes et vise à réduire les océaniens à de sauvages incultes, on pensera ici aux chansons « avec son ukulélé », « hapa haole hula girl », etc.. la liste est hélas immense et si il ne s’agit pas d’effacer ces objets musicaux de l’existence, il convient de les présenter pour ce qu’ils sont : des vecteurs du colonialisme et du patriarcat, comme nous le fûmes nous mêmes par paresse et manque de discernement, étant conscient de cet état des choses mais négligeant de le souligner quand l’occasion nous en fût donnée.
  • objectification recurrente des femmes hawaïennes par les images, connivence masculiniste facile dont ces pages ne sont pas dépourvues

Et surtout restons informés des luttes actuelles du peuple hawaïen, pour cela nous nous invitons à consulter et à vous abonner, comme point de départ, à quelques comptes Instagram qui donnent une idée à la source des préoccupations et combats des HawaïenNES, et évidemment pour ceux qui pourraient à la soutenir financièrement :

Les populations hawaïennes ne peuvent plus se loger dans leurs terres, accaparées par des colons qui prennent la forme de milliardaire privatisant une île entière, riches retraités des États-Unis, digital nomads et parasites qui profitent de leur supposé « mode de vie », massification touristique… Divers visages qui maquillent un mécanisme systémique ou l’oppresseur est majoritairement blanc et d’origine européenne et l’opprimé les femmes et les hommes hawaïens poussés hors de leurs terres ancestrales, interdits pendant des décennies d’utiliser leur langue, exploités de toutes les manières possibles.

Il nous semblait important que si ce site n’était plus mis à jour, ce soit cet article qui soit vu en premier.

Nous mettons l’accent sur Hawaii, mais nous avons parlé ici également de la Polynésie française, vestige de la culture coloniale hexagonale, qui n’a rien à envier aux Américains dans l’infamie. Afin de ne pas prendre l’espace de parole d’une communauté francophone, nous vous invitons à contacter et consulter les activistes polynésiens et nous les invitons à commenter le présent article ou nous indiquer comment les soutenir ou leur donner plus de visibilité.

À ceux qui s’offusqueraient d’un élan soudain de wokisme, nous les inviterons à ne surtout pas nous contacter ni commenter le présent article, afin de préserver un vocabulaire courtois et surtout parce-que nous ne souhaitons pas donner d’espace à la stupidité.

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